lundi 23 mars 2015

Justice aux affaires familiales

23 mars 2015

Il est 14h30 et, comme d'habitude à présent, je me suis levé vers 13h00, faisant une nuit et une matinée complète de sommeil. Je n'ai donc qu'une hâte, que les effets secondaires de ma radiothérapie s'estompent afin de retrouver un rythme de vie, de sommeil et d'éveil, normal. Ainsi, n'étant réveillé que depuis peu de temps, mon esprit n'est pas encore complètement alerte. Machinalement, pour être certain de ne pas me rendormir, je suis donc sorti avec mon ordinateur afin de me rendre à la terrasse d'une brasserie. En l’occurrence, c'est à la terrasse d'une crêperie que je me trouve, dans la rue piétonne du quartier République. Cependant aucune pensée, aucune question ne me vient spontanément, c'est dire que pour l'instant j'ai l'esprit tranquille.

Aujourd'hui, même s'il y a quelques nuages blancs qui encombrent un peu le ciel, ce dernier est bleu et le soleil qui l'illumine ne se fait pas prier pour, parfois, nous éblouir les yeux. Là, de suite, je pense à Cynthia. Je parle de soleil et subitement c'est elle qui s'installe dans mon esprit. Curieux, non ? A 17h00 je la rejoindrai à la maison. Elle sera rentré du lycée où elle exerce et nous irons faire des courses. Irons-nous au supermarché ou à la halle aux fruits et légumes, je ne sais plus ?

La rue piétonne est bien calme. Il faut dire que la majorité des commerces qu'elle abrite sont fermés, brasseries y compris. C'est le jour de repos pour les salariés, les employés et les patrons, ceux qui ont travaillé le samedi, voire le dimanche. Moi je ne travaille plus depuis quatre ans maintenant et, depuis un an et demi, j'ai bien compris que je ne suis pas prêt de retravailler, non parce que je ne le veux pas, mais simplement parce que mon cancer ne veut pas me mettre en rémission. Sitôt une métastase soignée à droite, une autre surgit à gauche. Une fois de plus je pense à Cynthia car je le sais bien, mon cancer, son évolution, ses effets secondaires l'inquiète fortement, et moi, tandis qu'elle se fait du mouron, je fume un cigarillo. Certes je ne fume plus comme auparavant, époque où je fumais vingt cigarillos par jour, mais je m'y suis néanmoins remis. Actuellement je fume entre deux et quatre cigarillos par jour, tout dépendant du temps que je reste dehors, car à notre domicile je me contente de la cigarette électronique. Oui, je n'ai pas assez de volonté pour arrêter l'un ou l'autre, voire les deux, ce qui serait encore mieux.

Je pense également à ma fille que j'ai eu hier soir au téléphone. A un moment nous avons discuté de ses résultats scolaire et je me suis aperçu qu'elle ne percevait pas le véritable enjeux de réussir à l'école. De cela, j'en reparlerai avec elle lorsque nous serons ensemble à Paris lors des vacances de pâques. Oui, son avenir m'inquiète car dans notre société il n'y a pas de place sur le marché du travail pour les traînards, pour les les derniers. Nous sommes dans un monde de compétition, que l'on soit un enfant ou un adulte. Nous sommes nombreux sur la ligne de départ, mais rares sont les élus, ceux qui deviendront, seront ou sont les meilleurs et, même parmi ces derniers, le marché de l'emploi ne leur est pas aussi ouvert. Hormis les mathématiques, ma fille est au dessus de la moyenne dans les autres matières. Cependant, si en classe de cinquième elle a déjà du mal à suivre, à comprendre et à assimiler les mathématiques, ce sont des pans entiers de secteurs d'activités qui lui sont d’ores et déjà fermés. Si elle n'arrive pas à avoir un niveau correct dans cette matière, adieu les secteurs technologiques tel que l'informatique, l'électronique. Adieu également tout ce qui est lié au médical, qu'il s'agisse de soigner l'homme ou l'animal. De même, adieu au secteur économique, qu'il s'agisse de finance, d'économie pure, de comptabilité, etc. Le français est la matière où elle est la meilleure, mais les lettres, la littérature, quels débouchés permettent-elles réellement en terme d'emploi ? Comme Cynthia, afin d'avoir la certitude de trouver un emploi, on peut finir professeur. Pourtant, à l'origine, ce n'était pas du tout l'intention de Cynthia de se retrouver membre de l'éducation nationale. Cela a été presque un choix par défaut et, fort heureusement, elle s’épanouit en exerçant ce métier qu'elle ne recherchait pas de prime abord. Ma fille, pour l'instant, a l'air de bien se débrouiller avec les langues étrangères. En anglais, sa moyenne est supérieure à 15 et, à côté de cela elle fait aussi du latin, matière où elle n'est pas mauvaise non plus. L'année prochaine elle devra choisir sa seconde langue étrangère. Elle m'avait dit qu'elle voulait apprendre le chinois, ce en quoi je l'encourage. L'année prochaine, d'un commun accord entre sa mère et moi, elle devrait intégrer un collège privé, car même si je suis cela de très loin, il m'est vite apparu que le collège publique où elle est était plus une source de problème que d'aide à la réalisation de soi, de son parcours scolaire. Depuis l'année dernière, souvent j'ai entendu ma fille me parler des cours où l'enseignant ne pouvait se faire entendre, ces derniers ne parvenant pas à se faire respecter de gamins et gamines de onze ou douze ans. Parmi ces enseignants, il y a évidement le prof de mathématique. A quel point dois-je croire ma fille lorsqu'elle me parle de l'ambiance qui règne lors de ses cours, je ne le sais pas. Par contre, j'ai ses notes, ses moyennes, comme grille de lecture. Cependant je sais aussi que ma fille, comme tout le monde ou presque, n'est pas enclin à faire plus d'effort que ça dès lors qu'une matière ne l'intéresse pas. Donc, vis-à-vis de ses résultats en mathématiques, je suis dubitatif. Dans cet échec, quelle est la place occupé par son professeur qui n'arrive pas à faire ses cours, quelle est la place de la fainéantise de ma fille ?

Il est à présent 15h30 et je sens enfin mon cerveau vivre, ma pensée devenir vive et c'est bien agréable, bien plus que de se sentir shooté, assommé. Je pense également à Mamy, cette lectrice inconnu qui vient régulièrement me laisser des commentaires, ce dont je la remercie. Dernièrement elle m'écrivait qu'elle me sentait souvent seul et triste. Puis-je dire que c'est totalement faux ? Bien sûr que non. Oui, il m'arrive de me sentir seul, surtout lorsque je suis chez moi et que Cynthia est absente, mais pour autant je ne suis pas triste en conséquence. Lorsqu'il m'arrive d'éprouver encore de la tristesse, c'est lorsque je replonge dans mon passé. Mais mon présent ne me rend pas triste. Parfois il me rend un peu morose, c'est vrai, d'autre fois il me rend dubitatif et, d'autre fois encore, c'est inquiet que je suis. Mais mon présent ne me rend pas triste, non, même s'il est vrai que je suis seul et que parfois j'aimerai l'être un peu moins. En cela Mamy m'aide bien, car à travers ses commentaires je me sens d'un coup moins seul et c'est en conséquence toujours un moment de ravissement pour moi. Quoi qu'il en soit je la trouve et la pense bien généreuse de s'attarder ainsi sur mes mots, sur ma vie, de prendre de son temps pour m'apporter son appui, son soutien, alors qu'elle ne me connaît pas du tout et qu'à priori nous ne nous rencontrerons jamais. Tout le monde n'est pas généreux, loin de là, même si tous nous pouvons avoir de la compassion pour l'histoire d'untel ou untel. Mais souvent notre compassion n'est suivi d'aucun acte de notre part et nous laissons l'autre avec lui-même, avec elle-même et son histoire. La générosité par contre, c'est agir, peu importe sous quelle forme, mais c'est agir, se manifester à l'autre, lui témoigner qu'il n'est pas aussi seul qu'il pourrait le penser, ce qui est d'un grand réconfort pour les personnes concernées. Oui, la générosité c'est donner de soi à l'autre, qui que soit cet autre, famille, ami ou inconnu et, encore une fois, surtout dans une société où la vie est dure pour beaucoup, rares sont les personnes généreuses car nous sommes si souvent enfoncés dans nos problèmes, en général matériels, que nous en oublions ceux qui nous entourent. Également, même si nous éprouvons de la compassion pour le problème de tel individu, parfois nous ne nous sentons pas la force de l'aider, ne serait-ce qu'en pleurant avec lui. Oui, quand nous sommes nous-mêmes pieds et poings liés avec nos problèmes, nous avons bien du mal à être généreux, à agir pour l'autre, ce qui ne nous empêche pas de nous imaginer à sa place, d'éprouver une réelle compassion et l'envie de faire quelque chose pour cet autre. Mais la force nous manque.

Dans la générosité, ma mère ressemble beaucoup à Mamy. Présentez-lui un problème et, bien qu'elle soit elle-même submergé par ses propres problèmes, elle se mettra néanmoins en quatre pour vous aider. En cela, je suis bien différent de ma mère. Je ne peux mener plusieurs actions de front en simultané. Effectivement, je ne sais pas faire autrement que de prendre les problèmes un par un et ce n'est qu'une fois que mes problèmes sont résolus que je peux, éventuellement, aider l'autre. Cela me rappelle l'époque où je militais au FMCP (fédération des mouvements pour la condition paternelle). Tous les lundi soir nous avions une permanence et accueillons tous les pères qui avaient des problèmes d'accès à leurs enfants. Parfois, mais cela était assez exceptionnel, ce sont des mères qui venaient nous demander de l'aide. Lors de ces permanences j'ai entendu des histoires que je n'aurai pas été capable d'inventer seul, qui dépassaient souvent mon entendement. Oui, face à moi j'avais chaque lundi soir des personnes en souffrance devant moi et j'étais à leur écoute, leur expliquant leur droits, les aidant à monter des dossiers juridiques, les incitant à tenter des médiations familiales avec leur ex. De même, et c'était là le plus dur pour moi, je devais faire comprendre à tous ces pères que la justice aux affaires familiales, en règle générale, ne serait pas de leur côté, à moins d'amener, de démontrer preuve à l'appui que leur ex était folle ou un véritable danger pour les enfants. Oui, je le dis sans honte, pour un père la justice aux affaires familiales n'est qu'une immense merde où la discrimination règne en maître. Peu importe les agissements de la mère tel que des non présentations d'enfant, des enlèvements, aucune n'est sanctionnée et, de plus, on leur laisse les enfants. Je me rappelle de Damien et de sa fille alors âgée de trois ans. Lui, comme la majorité des pères, avait eu le droit au traitement bateau que nous réserve la justice aux affaires familiales, c'est à dire de prendre sa fille un week-end sur deux et la moitié des vacances. Son ex, la mère d'Alésia, fit plus de 70 non présentation d'enfant. Chaque non présentation amenait Damien à déposer une plainte et malgré tout cela, malgré toutes ces preuves qu'il présentait au juge aux affaires familiale, qu'est-ce qui a changé ? Absolument rien. Puis un jour enfin notre justice commença à réagir, après plus de quatre ans de combat pour que Damien accède à sa fille, et demanda à ce que tous les trois, le père, la mère et la fille soit vu par une psychologue. Les conclusions de la psychologue furent implacables et dénonçaient clairement le comportement nocif de la mère vis-à-vis de l'enfant. Suite à ce rapport, le juge aux affaires familiales décida de confier la garde de l'enfant au père, Damien, mais la mère, une canadienne, prit la poudre d'escampette avec Alésia vers son pays natal. Depuis Damien n'a plus jamais eu de nouvelle de sa fille. Des histoires comme celle-ci, j'en ai à la pelle et je n'ai jamais vu une mère saine d'esprit être condamné à quoi que ce soit pour des non présentations d'enfants, pour des déménagements sans concertation avec le père de l'enfant, etc. Bref, une mère peut faire ce que bon lui semble avec son enfant et tant qu'elle ne met pas en péril la santé physique de son enfant, tant pis pour le père. Lui n'a d'autre choix que de subir les desiderata de la mère. Pendant deux ans j'ai milité activement au FMCP, tous les lundi j'étais présent, tous les lundi notre local était plein de nouveaux pères, de nouveaux visages. De même, toujours au sein de cette association, tous les jeudi nous organisions des débats autour d'un thème concernant l'enfance, la séparation, la parentalité et la gestion de ce beau bordel par la justice, juges en tête, mais également avocat qui, pour la plupart, cherche à amplifier les conflits déjà existants afin d'intervenir souvent dans ces histoires de divorces, de séparation, se faisant ainsi grassement payé à chacune de leur intervention. Bref, il se font de l'argent sur le malheur des autres et l'intérêt de l'enfant est bien le dernier de leur soucis. Plus le conflit dure, plus on fait appel à eux et plus le montant de leur compte en banque augmente. Voilà, c'est aussi puant que cela. Les avocats ne sont pas favorables à la médiation familiale, car si les deux parents arrivent à s'entendre, à trouver ensemble un compromis qui lèse le moins possible l'un et l'autre, alors ils n'ont pas besoin d'avocat. Effectivement, comme cela a été le cas dans ma propre histoire, la présence d'avocat n'est pas obligatoire face à la justice aux affaires familiales. Dans mon histoire, au début, la mère de ma fille avait prit une avocate. Moi je suis allé seul plaider ma cause, démontrer preuve à l'appui les mensonges de la mère de ma fille à mon encontre, dénoncer l'enlèvement de ma fille pendant quatre mois et, lorsque la mère de ma fille compris qu'elle n'aurait pas gain de cause auprès du juge, elle se passa également des services de son avocate. Au final, je n'ai pas eu pour autant la garde de ma fille, c'est tout ce que je retiens de notre justice aux affaires familiales, car pour elle peu importe tous les délits commis par la mère.

Cynthia vient de m'appeler, elle sera en retard pour me rejoindre et faire les courses. Effectivement, avant de venir me rejoindre, elle a appelé sa mère qui à elle-même un cancer. Leur conversation a duré plus longtemps que prévu parce que sa mère avait une baisse de moral, ce que je peux parfaitement comprendre vu dans quelles conditions elle vit depuis un an.

1 commentaire:

  1. mon petit courrier n'est pas parti? mystère; je ne vous oublie pas

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