samedi 14 mars 2015

6 et 8 décembre 2013

6 décembre 2013


Je suis en bas, à l'entrée de l'hôpital sud de Lyon, où j'attends donc les infirmière qui vont me ramener à l'hôpital de la Croix-Rousse, et face à moi que vois-je ? Des gens qui fument, qui fument leur cigarette. Aujourd'hui je comprends que ce que je vois ce ne sont pas des gens qui fument des cigarettes, je vois des gens qui se donnent la mort, sans même s'en rendre compte.

Aujourd'hui, bien que je me sois levé à trois heure du matin, je n'ai pas éprouvé, tout au moins jusqu'à présent, d'ailleurs je n'éprouve toujours pas le besoin de dire quoi que ce soit. Aujourd'hui ces mots sont, comment dire, comme un journal, comme si je tenais le journal du jour. Aujourd'hui donc je vais quitter l'hôpital. Le docteur qui s'occupait de mon cas, le chef d'orchestre, a pris la décision de ne plus me suivre. En d'autre terme il me met à la porte, ce que je comprends parfaitement vu toutes les difficultés, vu tous les ennuis et dysfonctionnements que j'ai occasionné dans le service de pneumologie où j'étais hospitalisé. Là, je suis en bas, en bas du bâtiment, toujours avec une cigarette, un café, et là-haut dans ma chambre Cynthia attend, attend que le docteur revienne nous voir, car même s'il refuse de me suivre dans, comment dire, le traitement à venir de mon cancer, néanmoins il va contacter d'autres de ses collègues dans un autre hôpital de Lyon, je ne sais pas encore lequel, pour que soit néanmoins programmé, comment dire, toutes les séances et tout le protocole de soin, avec les dates, donc que soit programmé et réalisé tout le protocole de soin dont j'ai besoin, que j'ai besoin de suivre pour traiter , soigner, voire guérir mon cancer. Une fois de plus, comme c'est le cas depuis quatre semaine maintenant, je m'en veux de mon comportement, plus exactement je m'en veux de ne pas pouvoir me contrôler, de ne plus y parvenir, je m'en veux parce que cela perturbe tout le monde, y compris moi-même. Avec le docteur, de son prénom René, car je n'arrive pas à retenir son nom de famille, la communication entre nous n'a jamais été aisé. Pourtant nous parlons la même langue, le français, mais les mots que nous employons, visiblement, nous n'y mettons pas du tout les mêmes sens, les mêmes significations. Pour René, le fait que je ne puisse me contrôler, alors que je le voudrai tant, dans certaines situations donc, que je ne puisse me contrôler, le terme qu'il emploi c'est « irrespect ». Il pense que je ne le respecte pas, ni lui, ni tout le service, ni, comment dire, toute l'organisation de l'hôpital et du traitement des patients en général. Vu sous cette angle, avec cette signification qu'il donne au mot respect ou irrespect, oui il a raison, c'est vrai, je suis irrespectueux. Mais dans mon esprit, le respect c'est autre chose, mais là n'est pas le sujet.

Là, sous mes yeux, depuis un bon quart d'heure déjà, le ballet des ambulances n’arrête pas. A croire, à croire, je ne sais pas, que c'est l'heure, comme les heures de pointe lorsqu'on part ou que l'on rentre du travail. Le ballet des ambulances n'arrête pas, les brancards en sortent vide, entrent dans la bâtiment, entrent dans l'ascenseur, montent dans les étages, et je revois ces mêmes brancards descendre avec cette fois une vieille femme, un vieil homme, allongés dessus. Via les rampes, les brancardiers rejoignent donc leur ambulance, montent le brancard à l'intérieur de l'ambulance, et Dieu seul sait où vont ces malades et pourquoi ils y vont. Le spectacle d'un hôpital, vu de l'intérieur, n'est vraiment pas gai, très très peu réjouissant, ce n'est pas un lieu où, à l'extérieur comme je suis, dans les cours d'hôpitaux, ce n'est pas un lieu où semble pouvoir jaillir des bonnes nouvelles, et pourtant Dieu sait qu'il doit y en avoir dans ce lieu, tous ces gens qui sont guéris, tous ces gens qui sont soignés et qui un jour quitte définitivement ce lieu. Forcément c'est des bonnes nouvelles, mais là, sous mes yeux et, ce, depuis quatre semaines, le spectacle que je vois, les patients, les brancardiers, les ambulances, les infirmiers, les infirmières, les docteurs, non, non, cela n’apparaît jamais comme une bonne nouvelle.


8 décembre 2013

Il n'est pas pareil de comprendre que l'on va mourir et de savoir. De même il n'est pas pareil de savoir que l'on va mourir et de l'éprouver. Enfin, il n'est pas pareil d'éprouver que l'on meurt que sentir que l'on est comme la mort.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire