mercredi 22 avril 2015

Mise au point

22 avril 2015


Par quoi commencer, j'en ai tellement plein la tête entre ma mère et ma fille, nos rapports, mes déconvenues et le peu de satisfaction que j'ai d'être à Paris, je ne sais quel bilan provisoire ou définitif en tirer.Avec ma fille, je joue l'animateur, d'ailleurs quel autre rôle pourrais-je jouer en période de vacance ? Ce qui me sied ne peut la satisfaire. Moi j'ai besoin de calme, ne peut faire de longues promenades, ne peut rester debout plus d'une demi-heure d’affilée sans éprouver une douleur au niveau des lombaires et de mes côtes. Elle, ce qui lui plaît, privilège de son âge, c'est l'action, l'agitation. Avant-hier, j'ai dormi dix-huit non-stop. Du coup je me suis réveillé hier aux alentours de quinze heure. Afin que ma  fille ne s'ennuie pas l'après-midi, je l'ai emmené à nouveau à la foire du trône et aujourd'hui c'est rebelote, encore la foire du trône à sa demande. Donc je suis avec elle, la regarde prendre du plaisir, mais moi je n'emmerde.

Hier soir, comme c'était convenue, nous sommes de nouveau allés dîner chez ma sœur, accompagnés de ma mère cette fois. J'étais épuisé de mon après-midi, surtout du temps passé dans les transports. C'est simple, nous avons passé plus de temps à faire l'aller et retour en transports que nous n'en avons passé à la foire du trône elle-même.Oui, ça aussi c'est la magie parisienne. Donc une fois chez ma sœur, vers 19h30, je me suis installé dans son canapé, attendant patiemment que nous passions à table. Ma mère avait préparé les entrées et Lùa, ma nièce, s'était occupée du plat principal. Une fois à table, ma mère ne pût s'empêcher de repartir sur ma maladie, sur ce que je devais manger ou non, boire ou pas, éviter le sucre et le sel, etc. Elle était comme d’accoutumé depuis que je suis à Paris sur ce sujet, autrement dit tellement inquiète qu'elle en est stressante, oppressante, que j'ai l'impression d'étouffer lorsque je suis à ses côtés. Dès mon arrivée, elle s'était mis en tête de modifier radicalement mon régime alimentaire et de faire en sorte que je prenne avec mes médicaments,  ceux prescrits par mes médecins, des comprimés de « médecine alternative », produits naturels, sensés être efficaces contre ma pathologie. Bref, elle voulait que je change du jour au lendemain mes habitudes, celles qui sont miennes depuis que j'ai mon cancer, mais avec une telle insistance que ses demandes m'étaient suffocantes. Cependant j'acceptai de prendre sa médecine parallèle afin qu'il n'y ait pas de clash entre elle et moi. Oui, ma mère n'a pas l'esprit ouvert dès lors que votre vision des choses diffère de la sienne. A sa sauce, elle vous fera alors comprendre que vous n'êtes qu'un abruti, un inconscient dans le meilleur des cas, et que vous ne comprenez rien à rien. Ma mère est une pro-bio, une pro-naturel, et critique presque systématiquement tout ce qui est chimique, comme la chimiothérapie, ou tout ce qui peut s'avérer toxique, comme la radiothérapie. En un mot, si on allait au bout de sa logique, on pourrait trouver des remèdes naturels au cancer, elle est même persuadée qu'ils existent déjà, et que c'est l'industrie pharmaceutique, pour se faire de l'argent, qui imposent la chimiothérapie,etc, sachant pertinemment que leurs remèdes ne sont pas efficaces. D'une manière plus générale, ma mère est une adepte de la théorie du complot. Elle en voit partout et gare à vous si vous ne les voyez pas aussi. Bref, hier soir à table chez ma sœur, j'en ai eu marre de sa volonté de prendre en charge ma personne et s'en est ensuivit un vif échange où j'ai remis les choses à leur place, ainsi qu'elle. Je lui rappelé que c'était moi le malade, que c'était à moi de décider la manière dont je voulais être soigné, certainement pas à elle. Face à ces éclats de voix, ma fille est alors sorti de table, se réfugiant sur le balcon de l'appartement, mais elle le fit dans un boucan si phénoménal que je crûs que sa chaise allait tomber. Du coup je rappelais ma fille et lui intimai l'ordre de revenir s'asseoir à table, lui demandant alors ce qui se passait, pourquoi elle avait quitté la table si brutalement. Elle me répondit qu'elle ne supportais pas les disputes. A cela je lui répondu que ce n'était pas une raison pour fuir comme elle l'avait fait, manquant de faire tomber sa chaise et ce qu'il y avait sur la table. Tout à l'heure, lorsque nous serons seuls tous les deux, je lui expliquerai  comment on peut « s'échapper » d'un conflit auquel on ne veut pas participer sans en rajouter une couche supplémentaire par un comportement inadéquate.

Tout ceci pour dire que je ne passe pas vraiment des vacances, que l'inquiétude de ma famille à mon égard, surtout celle de ma mère, est un véritable fardeau et, concernant ma fille, je regrette que ma santé physique ne me permette pas de faire plus de chose, plus de sorties avec elle. Mais c'est ainsi, je dois m'en accommoder tant bien que mal. Cependant il me tarde d'être à dimanche, de reprendre mon train pour Rennes où là, au moins, je ne serai plus tributaire d'attente de qui que ce soit et pourrait à nouveau vivre dans mon rythme.

2 commentaires:

  1. Zazou est hélas repartie avec ses enfants; son mari a pu être là le week-end et aussi le reste de mes enfants et petits enfants; tout cela était très fatigant certes mais si joyeux! J'ai dit à Zazou (pour rire) que ce n'était pas sympa d'écrire un poème sur la décrépitude alors qu'elle allait voir ses vieux parents pas si décrépis que cela surtout son père. Nous l'avons reconduite à Paris et vraiment, même si Paris est la plus belle ville du monde, c'est étouffant et nous étions bien contents de revenir dans notre campagne
    Mais assez parlé de nous
    Je comprends ce que vous éprouvez quand on vous materne; il faut néanmoins penser à ceux qui nous accompagnent dans la maladie et ça n'est pas facile pour eux non plus. D'autant plus qu'ils n'ont pas notre ressenti. Il faut les recadrer mais sans violence, surtout pour Jade. Cette dernière se construit des souvenirs avec son père et là est l'essentiel; ça doit être de BONS souvenirs. Certes, elle est comme toutes les ados, un peu ch...certainement mais on ne peut pas lui en vouloir d'aimer le portable ou l'ordinateur; c'est générationnel. Quant à votre maman, ça n'est qu'une maman angoissée qui voudrait aider son fils; enfin, c'est ce que je ressens; mais comme toutes les mamans elle est souvent maladroite car trop couveuse
    Vous parlez aussi de la culture marocaine. Comme vous je ne la comprends pas toujours. Les pères ne semblent pas bien présents encore aujourd'hui mais c'est leur culture; comment vont ils évoluer? mystère. Il y a aussi en France des pères qui ne s'occupent pas de leurs enfants. Quand je vois mon mari, discuter avec ses enfants ou chahuter avec ses petits enfants, je plains ses pères, ils passent à côté de l'essentiel. Mais au Maroc, l'élevage ( on ne peut même pas parler d'éducation) est réservé aux mères. Votre père est-il heureux? J'en doute
    Quand vous serez de nouveau à Rennes, vous repenserez avec émotion à ces moments passés auprès de votre fille
    Faîtes lui plein de Bisous d'un vieille Mamy, pas si décrépie. Pour vous, je réserve de grosses bises affectueuses

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  2. Bonsoir Mamy. Pour ma part j'ai trouvé superbe le poème de Zazou sur la décrépitude. Pensait-elle a vous, à votre mari, à la vieillesse pour autant? Je pense que c'est le plat constat de notre condition, que l'on soit vieux ou non, selon que les prémisses de la mort frappe à notre porte ou non.Quoi qu'il en soit, je suis content pour vous que vous ayez pu vous retrouver en famille, que vous y ayez pris du plaisir, ce qui n'a pas été vraiment mon cas, même si j'ai eu de bons moments. Oui, ma mère est trop couveuse et ce, depuis toujours, mais depuis que je suis malade c'est encore bien pire, au point que j'en suffoque parfois.

    Quant à ma fille, je pense qu'elle gardera un bon souvenir de son séjour, vu qu'elle n'a fait que s'amuser. Certes, les bons souvenirs ça compte, mais je ne me sens pas père pour autant, au sens ou vous, vous pouvez vous sentir mère, parent, de Zazou.

    Quant à la culture marocaine, vous ne la comprenez pas toujours. Moi, c'est pire, je ne la comprend pas du tout et parce que je pense que je n'ai plus tant de temps que ça devant moi, je pense également que je ne la comprendrai jamais.

    Il me tarde à présent de retrouver Rennes, de quitter cette ville que je ne supporte plus qu'est Paris, et surtout de retrouver ma compagne,Cynthia, mon seul point d'équilibre dans ces moments quelque peu bancals.

    Je vous embrasse bien fort Mamy et vous dis à bientôt, à quand vous voulez !

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