mardi 14 avril 2015

Avenir....

14 avril 2015


Réveillé depuis 5h30, il est à présent 9h30 et, comme tous les matin ou presque, je suis dans le quartier Sainte-Anne, à la terrasse d'un café, et malgré le soleil il fait quand même un peu frisquet. Ce matin, j'ai terminé la lecture du blog de Catherine. Ainsi, si j'ai bien compris le déroulement de toute l'histoire, depuis 2013 son cancer s'est stabilisé, mais les effets secondaires des diverse opérations qu'elle a subi sont, eux, toujours présents et pas agréables à vivre. Comme elle ne publie presque plus, en moyenne deux à trois articles par mois, je me dis que pour elle le plus dur depuis 2013, psychologiquement, est passé. Elle n'a plus le besoin impératif de s’épancher sur sa propre maladie, sur son sort malheureux, et ne publie que ses moments agréables à présent ou des appels à s'engager pour la lutte contre le cancer, que ce soit par le biais de donation ou tout autre moyen. Oui, c'est une militante de cette cause, ce que je ne suis pas encore, mais que je deviendrai peut-être. Ce serai là un bon moyen d'occuper mes journées et de me sentir utile à quelque chose. De tout cela je réfléchirai lorsque je serai à Besançon, lorsque j'aurai déménagé.

Je pense également à samedi prochain, jour où j'irai chercher ma fille à la gare. Je ne me souviens même plus à quand remonte notre dernière rencontre. Il me semble que c'était en février, mais je n'en suis même pas sûr, c'est vous dire dans quel état est ma mémoire et la radiothérapie, je le sais bien, n'arrange rien à la chose. Je me demande donc qui je vais trouver en face de moi samedi, cette jeune fille qui m'a promené, mené en bateau pendant plus d'un trimestre. J'avoue que j'ai un peu peur, peur parce que je vais être confronté une nouvelle fois à l'inconnu, peur parce que je sais qu'elle aussi sera dans la peur, peur de l'inconnu que je suis pour elle également, tout au moins en grande partie, et qu'en conséquence elle sera sur ses gardes, je le sais également, afin que rien ne dégénère entre nous pendant ces quelques jours ensemble. Il me semble que la foire du trône sera ouverte. Je n'ai jamais été dans cette immense manifestation de manèges et jeux en tout genre, mais je sais que Jade aime ça. Je prévois donc de l'y emmener. De même, parce qu'elle adore rester seule avec sa cousine, Lùa, la fille de ma sœur qui a dix-neuf ans, je m'organise avec elle pour que Jade puisse passer une nuit et une bonne journée chez ma sœur, avec sa seule cousine. Ce sera une journée en moins pour moi, pour être avec ma fille, mais je veux lui faire plaisir, ne veux pas qu'elle regrette son séjour à Paris.

A côté de cela, je pense à ma maladie, c'est plus fort que moi, à ces saloperies de métastases que j'ai dans le cerveau, et je me demande qu'elle sera le résultat de mon IRM prévue en juin. De même, lorsque je serai à Besançon ou dans sa région, je me demande par qui et où je serai suivi. Oui, à Lyon j'étais mieux suivi qu'à Rennes et j'ai peur que sur Besançon et alentour ce soit pire encore. Je suis donc d'avis que je retournerai à Lyon pour me faire suivre et, question transport, j'espère que ce ne sera pas trop compliqué. Oui, d'un hôpital à un autre, d'une ville à l'autre, le suivi et la coordination entre les divers médecins qui traitent votre cancer n'est pas du tout la même. A Rouen je ne sais ce qu'il en est, mais ici, à Rennes, c'est moi qui doit demander des rendez-vous avec mon pneumologue, qui est mon médecin référant en matière de cancer, qui doit assurer la coordination entre lui et mon radiothérapeute, qui doit me rendre compte des résultats des examens que je passe, qui doit programmer mes scanners et IRM, normalement effectués tous les trois mois, mais suite à ma dernière consultation avec la radiothérapeute, il s'avère qu'aucun rendez-vous n'était prévu avec mon pneumologue ni aucune date fixée pour mes examens. Il a fallut que ce soit moi qui appelle son secrétariat pour que soit rectifiée cette négligence. A Lyon, au centre Léon Berard, jamais cela ne serait arrivé. Est-ce que cela m'énerve ? Un peu, mais surtout cela ne me m'est pas en confiance.

Je repense à Catherine, à ses articles, surtout ceux de 2013, aussi forts dans la forme que dans le fond, puissants, qui paradoxalement donne l'envie de se prendre en main ou, si l'on est dans mon cas, l'envie de se reprendre en main, de ne pas se laisser-aller dans une espèce de « morfonderie », de résignation passive dans l'attente du moment fatidique  qui annoncera la fin inéluctable. Je pense évidement au cancer généralisé, où notre corps est si plein de métastases qu'il n'est plus possible de les endiguer, de stopper leur progression. Oui, à l'heure d'aujourd'hui,Catherine est mon exemple, un exemple à suivre quelques soient les diagnostics négatifs que l'on m'annoncera à l'avenir, quelques soient les effets néfastes des effets secondaires dont je serai le sujet. Oui, si un jour je perd le moral, il faudra que je me force à relire certains de ses articles qui, je l'espère, me requinqueront. Je pense également à Tony qui, lui aussi, est comme Catherine, un battant, un volontaire, mais à priori il n'est plus concerné par le cancer depuis qu'il a subi sa greffe de foi. Son foi cancéreux est à la poubelle et n'avait pas développé de métastases ailleurs dans son corps. Est-ce à dire que c'est réellement fini pour lui ? Je le souhaite de tout mon cœur tant cette maladie est une vraie merde, tant elle pollue autant le corps que l'esprit.

Il y a deux jours je me suis inscrit au forum de la Ligue contre le cancer. Je viens de m'y rendre et je suis tombé sur la question d'une femme qui posait des questions sur le cancer qu'avait sa mère, un cancer identique au mien, et qui ne comprenait pas que sa mère ait laissé tombé les soins, se remettant à fumer trois paquets de cigarettes par jour, attitude que sa fille n'arrive pas accepter. Je lui ai laissé un message, lui expliquant les techniques de soins pour soigner ce type de cancer, lui disant également que si sa mère avait fait le choix de se laisser mourir, il fallait respecter ce choix, même si cela n'était pas facile, et l'accompagner du mieux qu'elle pouvait. Ais-je bien fait, ais-je mal fait de lui donner mon opinion sur la question, je ne sais pas. En l'état, il est hors de question que je me laisse sciemment mourir en refusant soins, etc, car je veux que ma fille ait son père au moins jusqu'à son entrée dans le monde adulte. Cela nécessite que je vive au moins cinq ans encore, quoi qu'il arrive, et je vais m'employer à tout faire pour. Du coup je pense à certaines de mes conversations avec Cynthia qui, elle, est une adulte. Sans détour je lui dis qu'elle doit dorénavant planifier sa vie comme si je n'étais pas là, qu'il s'agisse de son choix d'académie pour exercer sa profession, du choix de la maison qu'elle voudra acheter, bref, qu'il faut qu'elle agisse comme si je n'étais pas là car, maladie ou non, je partirai logiquement avant elle de notre monde du simple fait de notre différence d'âge. Aussi, étant malade, je veux qu'elle ne se prive de rien qui puisse contribuer à son épanouissement, y compris en s'achetant des poules et un coq le jour où elle aura sa maison et son jardin. Ce type de conversation, le sujet de ma mort, n'est pas le plat préféré de Cynthia, mais à quoi sert-il de se voiler la face, à faire comme si notre couple pouvait être éternel, surtout depuis 2013 ? Cependant, je vous rassure, je ne la bassine pas tous les jours avec ça, loin de là, mais dès qu'il s'agit de son avenir, professionnel ou autre, je veux qu'elle pense d'abord à elle. Moi, quoi qu'il arrive, je m'adapterai toujours, d'une façon ou d'une autre.

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