lundi 27 avril 2015

Dans le train

26 avril 2015


Ça y est, je suis dans le train qui me conduit à Rennes, je quitte Paris, son bruit, son mouvement, son agitation permanente, et m'en vais retrouver le calme et mes petites habitudes. Ce soir, avant de partir pour la gare, j'ai dîner chez ma sœur. Ma nièce et son compagnon m'ont accompagné jusqu'à la gare, jusqu'à mon train. Nous avons bu un dernier verre ensemble devant la gare Montparnasse pis, une fois arrivé à mon wagon, nous nous sommes dit longuement au revoir. Demain j'appellerai Tony pour le remercier d'avoir été disponible, même si je n'ai pas eu grand chose à lui dire, même si je n'ai pas été d'un grand amusement ou d'une grande détente pour lui. Il n'empêche que comme d'habitude il a été présent, fidèle à l'image que j'ai du personnage. Là, maintenant, je m'en vais retrouver Cynthia, ma Cynthia, et tout à l'heure, d'ici deux heures à peu près, je serai allongé à ses côtés, dormirai auprès d'elle.

Ce midi, comme convenue hier avec mes amis de la porte de Saint-Cloud, j'ai été les retrouver pour l'apéritif. Tous ceux présents, Tony y compris, étaient des portugais et s'interrogeaient pour se donner plus tard, en début de soirée, rendez-vous dans un café portugais afin de regarder un match de foot concernant le championnat du Portugal. Nous sommes resté ensemble un peu plus d'une heure et c'est à ce moment-là que j'ai dit au revoir à Tony, avec un petit pincement au cœur il est vrai, me demandant quand je le reverrai à présent. Effectivement, jusqu'à présent, il m'était simple de monter à  Paris car je logeais chez ma mère, dans le cinq pièces où j'ai grandi. De même, du fait de la taille de l'appartement, il m'était également aisé de prendre ma fille avec moi sur Paris. Mais les choses vont changer, dettes de ma mère oblige, car elle a reçu son avis d'expulsion de son appartement dû à des loyers impayés. Effectivement, même si ma mère réside dans un HLM, du fait du montant ridicule de sa retraite, elle ne pouvait assumer seule un loyer de 800€. Cependant, l'organisme qui gère son appartement lui en a proposé un autre, un deux pièces, toujours dans le quartier de la porte de Saint-Cloud, logement qu'elle devrait intégrer en septembre prochain. Du coup, il ne me sera peut-être plus aussi aisé de descendre à Paris dans l'avenir, sauf si je suis seul. Cela signifie que quelque soit l'endroit où j'habiterai dès cet été, c'est dans ce logement ou cette maison que je recevrai désormais ma fille.

Ayant encore plus d'une heure à passer dans mon train, je me demande sur quoi je pourrai écrire et devinez ce qui me vient en tête ? La maladie, le cancer, ce crabe qui m'enserre de ses pinces, qui ne semble pas vouloir me lâcher les neurones, qui veut grossir et grandir en moi, à notre détriment à tous les deux, car me tuant par son désir d'immortalité, il se tuera ainsi lui-même. Quelque part, nous les humains, lui ressemblons quelque peu. Par notre désir de puissance, notre volonté de dominer, que ce soit soi-même, l'autre ou notre environnement, nous détruisons ainsi bien des choses et bien des êtres. Parfois je pense à nos lointains ancêtres, les premiers homo-sapiens, qui ne devaient pas être bien nombreux, vivant par petit groupe, par petit clan. Combien étaient-ils à l'origine ? Mille, deux mille, cinq mille ? Et à présent combien sommes-nous ? Bientôt sept milliard. La Terre est-elle faite pour accueillir autant d'humain ? Par notre présence en si grand nombre et notre manière de nous comporter dans notre environnement, ne mettons-nous pas la Terre, notre demeure, en danger, tel que le font mes cellules cancéreuses dans mon corps ? Certains le disent, parlant de biosphère, de gaz à effet de serre et autres dégâts dont nous serions la cause. Nous serions le cancer de notre planète car n'ayant plus de prédateurs menaçant nos vies, il n'y a plus rien pour enrayer la croissance de notre espèce et, parce que nous respectons rien, ou alors très peu de chose, très peu de personne, parce que nous prenons rarement en question notre environnement lorsque nous décidons d'agir, alors oui, forcément, nous instaurons des déséquilibres, des instabilités, voir pire nous détruisons.

Mais revenons à mon cancer. Qu'est-ce que j'en pense ce soir ? Et bien pas grand chose. Évidemment je me demande comment il va évoluer, s'il va ou non progresser, attends mon IRM au mois de juin qui, je l'espère, m'en dira plus sur ces questions, mais pour l'heure c'est surtout sur les effets secondaires de mes séances de radiothérapie, sur les effets actuels de mes tumeurs que je focalise. Par exemple, pour écrire, je n'arrive pratiquement plus à le faire avec ma main droite. Oui, je suis droitier et c'est donc une gêne pour moi. Cynthia m'a dit que je devrai m’entraîner tous les jours à écrire un peu, afin de retrouver de la dextérité en la matière. Peut-être n'a-t-elle pas tort. De même, je ne peux que constater, prendre acte, de ma difficulté à suivre une conversation dès lors que mon interlocuteur parle trop vite. Souvent je dois me répéter dans ma tête la phrase qu'il vient de prononcer pour parvenir à la comprendre, à en saisir le sens. Du coup, entre-temps, je n'écoute plus la suite de sa conversation, trop occupé que je suis à me répéter la phrase que je n'ai pas saisi sur le champs, et lorsque cette dernière est enfin intégrée dans mon esprit, me remettant en mode écoute de la conversation, je suis largué car je n'ai pas entendu une partie de cette dernière.

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