mercredi 18 février 2015

Traitements

Voilà, une fois de plus je sorts d'une consultation. Après mon IRM lundi dernier, IRM du cerveau afin de bien localiser ma troisième métastase cancéreuse, aujourd'hui les infirmières ont préparé un  masque pour mon visage, celui qui vissera ma tête sur la table où je serai allongé lors des séances de radiothérapie. Trois à cinq séances sont prévue, selon la taille de ma métastase je suppose. Bref, je rentre à nouveau dans une phase de soin et, pour la troisième fois, je serai traité avec un appareil du nom de Cyberknife, celui-là même qui inondera mon cerveau de radiation. En France, il n'existe que sept appareils similaires. C'est le dernier cri, la dernière technologie, la plus aboutie, la plus prometteuse en matière de radiothérapie. Quoi qu'il en soit j'ai l'impression d'être dorénavant dans une routine qui m'indiffère, où bonnes ou mauvaises nouvelles concernant ma maladie ne changent plus mon quotidien, mon état d'esprit, où les traitements, aussi efficaces soient-ils, ne sont pas de mon monde tant je ne comprends rien à ces nouvelles technologies. Je me laisse traiter comme un bébé se laisse changer sa couche, sans poser plus de question que ça, sans me préoccuper de l'efficacité réelle ou non de ces traitements. S'ils marchent, tant mieux, et dans le cas contraire, tant pis.

Mais assez parlé de tout cela qui n'intéresse personne au final. Seulement cela me ramène à ma vie que les médecins essaient de prolonger et donc à la mort qui plane au-dessus de moi. Depuis quelques mois, depuis que j'ai accepter l'idée de ma mort proche, à court ou moyen terme, je me sens planer entre deux eaux. Une chose est certaine, je ne suis plus sur terre, dans votre monde, dans vos valeurs. Toutes ou presque ont volé en éclat car aucune ne résiste à l'analyse lorsque l'on se retrouve confronté à ce qui s'apparente à une fin de vie. Toutes les valeurs, aussi nobles soient-elle, sonnent ridicules face à cette montagne qu'est la mort.

Si mon corps, mon esprit, pouvaient encore supporter les drogues, haschisch ou héroïne, c'est sans état d'âme que je me défoncerai tous les jours, histoire de planer encore plus haut. Malheureusement, ayant trop abusé de ces substances dans ma jeunesse, mon corps ne les supporte plus. Alors il ne me reste que les médicaments, les anxiolytiques exactement, pour planer un peu plus que de coutume et ne pas trop éprouver la peur qui, parfois, me tenaille à l'idée de mourir bientôt. Non, je ne suis pas un super-héros ni un super-homme, et même si je me familiarise un peu plus chaque jour avec cette idée de ma fin, ce n'est pas pour autant que je me sens le courage de l'affronter de face en ce moment. Oui, malgré ma maladie qui ne s'enraye pas, je peux encore faire des choses, vivre des moments qui me sont fort agréables et c'est bel et bien vivant que je me sens, non dans une longue descente aux enfers tel que c'est le cas pour ma belle-mère. A partir de là, même si je ne cherche pas à la fuir, je ne cherche pas non plus à précipiter ma rencontre avec ma mort. D'ailleurs, souvent je me dis que je mourrai d'autre chose que du cancer, tel un accident de la route par exemple ou une agression physique de la part de délinquant qui me laisseraient pour mort sur un trottoir. De même, je pourrai développer une maladie mortelle autre que le cancer, tel Ebola ou je ne sais quel autre virus du même acabit. Je pourrai également faire une AVC, avoir une rupture d'anévrisme, etc. Bref il existe tant de possibilité de mourir et ce, du jour au lendemain, que le cancer m’apparaît encore comme un moindre maux. Même si le flou, l'incertitude dans lequel il nous plonge n'est pas feinte, il nous laisse quand même quelques mois, voire des années devant nous, temps dont il faut profiter au maximum, ne lésinant pas pour se faire plaisir et vivre pleinement chaque moment. Oui, chaque jour passé est comme un don du ciel et tant mieux si demain je suis encore là. Cependant je ne pleurerai pas lorsque viendra le jour final parce que, justement, j'en aurai profité auparavant.


(18 février 2015)

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