lundi 23 février 2015

Ecriture

Désert, monticules de dunes, je n'écris plus comme avant. La forme a changé, cette forme que je m'étais tant appliqué à créer, elle a disparu. Plus de poésie dans mes textes, plus rien qui ne berce ou transperce, juste une écriture plate, sans relief, sans écorce, sans tronc. C'est ainsi depuis que je me suis remis à écrire, mais depuis quand avais-je déjà perdu la forme d'écriture qui était encore mienne il y a trois ou quatre ans ?

Je ne peux m'empêcher de mettre ma maladie en cause. Depuis qu'elle est là, je n'arrive plus à concentrer ma pensée plus de dix secondes d’affilée sur quelque mot ou idée que ce soit. Un mot arrive et à peine ais-je le temps de m'attarder sur lui qu'un autre le chasse de mon esprit. Je commence alors à vouloir écrire ce second mot et voilà que déjà un troisième le chasse, c'est lui qui s'écrit, et au final j'ai perdu le fil directeur de l'idée initiale. Cela, c'est ma mémoire, mémoire sélective, mémoire qui ne semble plus fonctionner, qui ne m'aide plus à me rappeler de l'instant, du très court terme et du court terme. Oui, si j'ai quelque chose d'important à faire, je dois à présent le noter dans mon agenda, agenda que je consulte plusieurs fois par jour pour être sûr de ne rien oublier dans ma journée et dans ma semaine.

Cependant, ce que j'aime c'est écrire et aujourd'hui, parce que je n'arrive plus à utiliser la forme qui me plaît pour écrire, je me retrouve handicapé du vocabulaire, de la grammaire, de la syntaxe. L'idée seule de rédiger un poème me paraît harassante à l'avance, épuisante du simple fait qu'il faudrait que je me concentre, que je cherche mes mots sans oublier le fil directeur, et pourtant j'aimerai savoir le faire à nouveau. Je m'y suis essayé, mais ce fût peine perdue. Ce que j'écris depuis trois bons mois maintenant est aussi plat qu'un papier journalistique traitant de cuisine ou de politique, aussi ennuyeux à lire. Pour tout vous dire, je ne me relis même plus tant, déjà à l'écriture, je trouve mes mots et mes phrases fades, sans goûts, sans plus aucun sel. Certes mes écrits reflètent un état d'esprit, celui qui est mien au moment où j'écris, mais il n'y a aucune beauté dans ces derniers, aucun suspens, aucun délice, simplement des états d'âme qui s'impriment automatiquement, machinalement, où aucun jardin ou falaises ne sont construits, où aucun doute ne plane sur ce qui peut me traverser, qu'il s'agisse de ma maladie ou d'autre chose.

Hier, quelque soit la longueur de mes textes, je les écrivais comme l'on bâtit une maison. L'édifice, l'armature de la maison était claire et nette. Après il me suffisait juste de remplir les pièces, chaque pièce ayant son propre décors, sa propre odeur, sa propre autonomie. Aujourd'hui tout cela est révolu car je n'ai plus de charpente, d'ossature à combler. Seule ma personne est devenu mon armature et parce que je suis un et pas deux, il n'y a toujours qu'une même pièce à meubler, autrement dit moi-même. Mais cette pièce qu'est-elle, si ce n'est qu'une succession de souvenirs ? Et j'en ai marre de m'étaler sur ces derniers, j'aimerai vivre autre chose, écrire sur d'autre chose. Malheureusement je n'ai pas assez d'imagination pour écrire des romans, dénicher des trames. La seule chose que je sache faire à l'écrit, c'est planter des décors, qu'il s'agisse de moi-même ou de monde imaginaire. Oui, je suis doué pour imaginer, inventer des décors du passé, du présent ou d'hypothétiques futurs. Je peux vous décrire les baraques, les types de véhicules, les idéologies de ces univers qui ne sont présent que dans mon esprit, mais je suis incapable d'y ajouter une trame, une histoire, tant tout a déjà été fait en la matière. Dois-je m'interdire pour autant d'essayer, ne serait-ce qu'une fois, d'écrire un roman ? Cela me permettrai de m'évader un peu de moi-même, de regarder d'autre nombril que le mien et, qui sait, de rêver un peu.


(23 février 2015)

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