mercredi 9 septembre 2015

Semaine ardue

9 septembre 2015


Depuis mon dernier article, je n'ai pas ouvert mon ordinateur de la semaine. Je ne me souviens plus quel est le jour où j'ai écrit cet article, j'ai seulement en mémoire que j'ai passé un samedi de merde, à m'ennuyer comme cela ne devrai pas être permis, et que le dimanche ne fût guère beaucoup mieux. J'ai donc rencontré ma nouvelle oncologue lundi dernier qui m'a prescrit toute une batterie d'examen et de prise de sang, dans le but d'utiliser la chimiothérapie orale pour lutter contre mes métastases qui augmente de volume. A cette fin, pour pouvoir bénéficier de cette technique de soin, il faut que mes cellules cancéreuses soient d'un certain type, on appelle cela des cellules mutantes, car si elles ne le sont pas, alors pas de chimiothérapie orale. Donc depuis lundi j'étais pris entre pleins de rendez-vous, Cynthia qui n'avais pas le moral, et ma recherche éperdue pour passer ce fameux Spectro IRM cérébral dans un délai autre que celui de deux mois d'attente. Ce matin mon meilleur ami, Tony, m'a appelé pour m’annoncer la bonne nouvelle. Il a réussi à me trouver une place pour cet examen, à Paris, pour vendredi matin, après-demain donc. C'est presque qu'en catastrophe que j'ai été acheté immédiatement mon billet de train. Ainsi, demain matin j'ai un scanner à passer dans une clinique à Belfort et, vers 16H30 je serai dans le TGV qui me mènera à Paris. Enfin, le lendemain matin, à 10H00, je passe mon Spectro IRM. Je rentrerai à Belfort dimanche, dans l'après-midi, histoire de voir entre-temps ma famille et mes amis. Cependant, même si j'aurai avec moi les résultats de cet examen avec moi, j'ai appris que mon radiothérapeute était en vacance. Alors qui va décider quoi et quand à sa place ? De même, ayant constaté lors de mon rendez-vous avec ma nouvelle oncologue qu'elle n'avait eu aucun entretien avec mon radiothérapeute, qu'enfin de compte chacun faisait son petit truc dans son coin, j'ai pris la décision d'être suivi à Paris, à l'hôpital la pitié-salpêtrière réputé pour tous les soins relatifs au cerveau. Je suis donc entré en contact avec eux, avec le service spécialisé dans la radiothérapie, et ils m'ont dit qu'il n'y aurait aucun problème pour que je sois pris totalement en charge, même si j'habitais officiellement Belfort. Je dois donc recevoir par courrier une convocation de leur part pour un rendez-vous avec le professeur de ce service. Je prendrai alors un aller simple pour Paris et résiderai chez ma mère tout le temps qu'il faudra, le temps que ma « santé » se stabilise, le temps des éventuels autres examens, des soins et des traitements. Après seulement je retournerai rejoindre Cynthia à Belfort. Même elle, d'après ses dires, préfère que les choses se passent ainsi.

Je pense également à sa mère dont l'état empire. Les cellules cancéreuses qui sont dans ses os lui font un mal indéfinissable. En une semaine, la dose de morphine qu'elle prenait jusqu'alors a été doublé, elle a également commencé ses séances de radiothérapie sur ces fameuses cellules, mais rien n'y fait, elle souffre le martyr, pleure, et elle a dû être ré-hospitalisé en début de semaine. Je me demande où tout cela va la mener, va nous mener, va mener Cynthia et son père.

Tout ceci mis à part, ces bonnes nouvelles qui ne donnent pas une seconde envie d'y croire, qu'il s'agisse de ma santé ou de celle de ma belle-mère, où en suis-je dans ma tête, dans mon cœur, avec mon corps ? Plus les jours passent et plus j'ai l'impression de faire mon deuil. Je ne sais si c'est le deuil de tout ce que je vais quitter en mourant ou si je suis dans le deuil des autres, famille, amis, vent, soleil, souffle, qui vont me quitter. Oui, je ne sais qui quitte véritablement qui au final. Mais contrairement au deuil « classique », celui que l'on fait lorsqu'une personne nous quitte, meurt, je n'ai rien qui puisse me changer les idées sur mon sort, rien qui ne puisse me faire dire à moi-même que la vie continue néanmoins, qu'elle n'est pas fini ou entrain de se finir. Comme le dit si bien Mamy, elle et moi nous savons condamnés, mais ne connaissons pas la date exacte. Dans mon cas, parce qu'il s'agit du cerveau, je sais qu'une fois que le corps médical se dit impuissant, alors ça va très vite. Mais bon, demain est un autre jour et, comme l'on dit, à chaque jour suffit sa peine. Cependant, ma sensation, mon sentiment en ces jours qui passent, est celui de marcher, allant de l'avant, toujours de l'avant, sur une grande route droite, dans laquelle il n'y a aucun virage, et qu'à chaque fois que je me retourne je vois ce que je délaisse, ce que j'ai connu et traversé, mais que je ne pourrais plus jamais atteindre, qui ne m'est plus accessible, appelons cela le passé, et que lentement mais sûrement, inéluctablement, inévitablement, je ne vois derrière moi qu'un horizon très très lointain, comme si c'était des millénaires d'existence, des divers climats qui l'ont accompagné, comme si c'était la naissance d'une planète au lointain, son évolution dans les grandes lignes, puis un jour sa maturité, lorsque tout semblait construit et inébranlable, puis, au fur et à mesure que ma tête pivote pour regarder droit devant elle, mon regard constate la lente dégradation de ce qui fût construit, bâti, avec le meilleur et le pire, pour enfin ne voir devant moi qui avance toujours, parce que je ne peux faire autrement, c'est bien le temps qui dirige et commande à mes pas, non le contraire, je constate que j'arrive au bout de la course, que cet horizon-là est à quelques pas de moi uniquement, que ce sera la fin de cette planète, que ce sera un big bang avec lequel je disparaîtrai à jamais.

1 commentaire:

  1. Bien contente de savoir que ma modeste personne puisse vous donner un peu de courage
    Bien contente de savoir aussi que vous allez vous faire suivre par les oncologues de Paris; j'avais l'impression qu'en province, vous tourniez en rond
    Et bien contente encore de savoir que Jade sera bientôt près de vous; alors accrochez vous, personne ne peut savoir quand sera sa fin
    Je vous embrasse très fort ainsi que Cynthia
    Mamy

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