lundi 24 août 2015

Fin de journée

24 août 2015


14h30, il pleut toujours autant. Je me suis recouché vers 10h00 du matin après avoir pris deux bons calmants, mes fameux Xanax. Réveillé vers 12h30, je me sentais toujours tendu, en colère, comme ce matin à mon premier réveil. La cause de cette brutalité est chimique, elle s'appelle la cortisone, celle que je prends s'appelle le Solupred. Étant toujours aussi tendu, juste avant de sortir, j'ai pris deux autres Xanax. Dans deux heure je dois voir le psy, je parlerai de tout ça avec lui et verrai s'il me propose un remède ou pas, non pas comme à l'emporte pièce comme il me l'a fait la dernière fois. De même, sachant que je vais augmenter mes doses de calmants ces prochains jours, c'est évident, je lui demanderai également qu'il me fasse une ordonnance pour cela.

Je sais, je vous fais chier à parler de médicaments, de soins, de maladie, sans m'étaler plus sur mes états d'âme. Mais je pense que parfois, à travers ces préoccupations banales, ordonnances, soins, transpirent parfois ce que j'éprouve. Là, je suis assis à la terrasse d'un café de l'une des deux rues de Belfort. Ici, alors qu'il a l'air de pleuvoir souvent, voire plus souvent qu'à Rennes, les terrasses ne sont pourtant pas aménagées pour faire face aux intempéries. Je suis même dans l'idée qu'en hivers, il ne doit y avoir aucune terrasse sortie. Plus que les paysages, Belfort est entouré de montagne, élément que je n'aime pas, c'est le climat qui me semble spécial. Hier je pouvais me promener torse-nu, y compris à l'ombre, et aujourd'hui je suis habillé comme en hivers, avec pull, tee-shirt, etc. La température est pourtant correct, plus de 20°, mais il y a ici un vent très frais qui ne cesse de souffler. Lorsqu'il fait beau, il est agréable et rafraîchi, mais dès qu'il fait moche ou que le soleil se couche, alors il faut mettre les manteaux, voire les pulls. Si c'est déjà ainsi en plein été, qu'est-ce que cela promet pour cet automne et cet hivers.

Il est 17h30, je suis sorti de chez mon psychiatre et, cette fois, l'entretien s'est mieux déroulé que la première fois. Cette fois il s'est attardé sur mes questions, y a répondu clairement, et m'a indiqué pourquoi il m'avait prescrit l'antidépresseur la dernière fois. Effectivement, constatant la dose de Xanax que je prenais, il m'a précisé cette fois que c'était un antidépresseur qui avait un effet anti-anxiogène qui agirait en deux ou trois jours, me permettant ainsi, normalement, de diminuer mes prises de calmants. Aussi je commencerai ce soir à le prendre et, en fin de semaine quand je reverrai mon psy, nous ferons déjà un premier point.

Sinon, demain Cynthia et moi seront toute la journée à Lyon. Oui, j'ai décidé d'aller quand même voir le premier radiothérapeute qui s'est occupé de moi, afin d'avoir son avis, même si je pense qu'il me dira sensiblement la même chose que la radiothérapeute de Besançon. Effectivement, je n'ai eu aucun contact de l'annexe d'oncologie que le CHU de Besançon à Montbéliard aujourd'hui, c'est dire qu'ils ne sont pas pressés ou qu'ils sont en sous-effectifs, ce qui ne m'inspire guère confiance. Enfin, si pour une raison ou une autre, ni Besançon ni Lyon ne font l'affaire dans mon histoire, alors j'irai sur Paris, ma décision est là-aussi prise, je me ferai domicilier chez ma mère, ce qui impliquera malheureusement que je verrai beaucoup moins Cynthia, ce que je ne souhaite pourtant pas du tout, mais au moins je serai suivi correctement, par des médecins reconnus et qui sont équipés des derniers matériels de pointe en matière de radiothérapie. Oui, dans mon esprit tout cela devient de plus en plus clair, rester à me faire soigner ici, en Franche-Conté, signifiera faire du bricolage, sans plus à priori. Cependant j'attends tout de même d'avoir un rendez-vous avec l'équipe de Montbéliard, sait-on jamais, il peut y avoir des surprises.

Tout ça mis à part, comme vous le constatez je recommence à écrire. Non pas que j'en ai tant envie que ça, car je ne vois pas ce qu'il y a de passionnant à parler et à lire sur des traitements médicaux, sur les consultations chez les uns ou l'autre, oui, tout ça ne dit à personne comment le malade se vit, comment il s'éprouve, comment il se voit aujourd'hui et demain et, parce que nous sommes dans le même cas, je pense plus encore à Lila, à François le compagnon de virginie, me disant qu'ils ont peut-être traversé, eu, les symptômes que je viens d'avoir pendant une semaine, paralysie, crise d'épilepsie, troubles du langage, ou d'autres tout aussi handicapant. Oui, comment se vivent-ils eux aussi. Ni l'un ni l'autre ne sont expansif, comme si c'était presque une honte d'être malade, d'être fragile, de ne plus pouvoir être au top.

Enfin il y a les autres cancers, je parle de ceux que l'on ne peut soigner, comme celui de ma belle-mère et de Mamy. Aujourd'hui je suis à égalité avec elles, contrairement à hier, je suis bel et bien entrer dans l'attente de ma fin.

Je ne cesse de penser à ma fille, ne sachant justement pas quoi en penser, comment l'aborder, comment ne pas trop la brusquer sans lui mentir pour autant, oui, je suis plein d'interrogations.

Tout de même, qu'il est dur de se savoir, de s’accepter impuissant face à soi-même.

« Un malheur prédit, lorsqu'il survient enfin, est dix, est cent fois plus dur à supporter qu'un malheur que nous n'attendions pas. Tout au long de notre appréhension, nous l'avons vécu d'avance, et, quand il surgit, ces tourments passés s'ajoutent aux présents, et forment ensemble une masse d'un poids intolérable. » (Cioran, « De l'inconvénient d'être né »)

4 commentaires:

  1. Bonsoir Hicham,
    Je te lis tout les jours et à chaque fois ça me déchire le coeur, ma tumeur est localisée dans la zone de motricité du côté droit de mon cerveau et quand j'ai des crises d'épilepsie partielles c'est mon côté gauche ( bras et jambe) qui se paralysent aussi je n'arrive pas à avaler ma salive.
    D'après ce que j'ai compris tes tumeurs sont localisées du côté gauche de ton cerveau, dans l'air de broca d'où ton incapacité de parler pendant tes crises et sûrement aussi dans la zone motrice parce que tu as des paralysies du côté droit (le cerveau droit commande le côté gauche du corps, le cerveau gauche commende le côté droit) , j'ai pas du tout honte de ma maladie je vis avec tout les jours, je te souhaite du courage, à très bientôt.
    Lila.

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  2. comme je passe par là... j'adresse un petit coucou à Hicham, j'en profite (je me permets aussi) d'en adresser un aussi à Lila avec qui j'avais commencé à converser via Facebook, n'hésites pas à m'ajouter à tes contacts si tu souhaites parler et poursuivre nos échanges et remercier Mamy pour le partage de ses lectures/textes d'Aragon que j'affectionne aussi...
    Hicham, pourrais-tu me glisser en mail ton adresse stp ? je t'en remercie.
    à bientôt à tous, bonne et belle journée... meilleure et bonne santé aussi,
    je vous embrasse tous
    Virginie

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    1. Bonsoir Virginie, je voulais te rajouter dans mes contacts mais je me rappelle plus de ton nom de compte, je te donne le mien: lila rostane
      bonne soirée, bisous.

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  3. Sur ton écran tu jettes tes maux en paroxysme,

    Tu y cries ta souffrance, un long cri d’exorcisme.

    Tu y verses ta vie à la façon d’un prisme

    Qui se reflète alors en halo d’humanisme.



    Je ne sais pas ton nom, ni ne vois ton visage,

    Mais j’entends ta douleur, tes hurlements de rage,

    En des mots torturés entrelaçant tes pages

    Qui sans doute te donne un élan de courage.



    Tu te noies sous les vagues du mal de mal-aimé

    Qui lacèrent ton âme en des flots déchainés.

    Moi je ne puis t’offrir qu’une bulle virtuelle,

    Une once d’oxygène, qu’elle soit éternelle.



    Le crabe te dévore ton cœur et ton esprit.

    Je ne te dirai pas ces mots si agaçants,

    Ces conseils et avis qui gonflent tes tourments.

    Je pense juste à toi, mon irréel ami.

    Quand je lis ce poème de Zazou, j'ai l'impression qu'il vous est destiné ou on pense à vous en le lisant

    Vous ne savez pas comment aborder vos problèmes de santé avec votre fille; un conseil: sans vous appesantir, dîtes lui la vérité. Tout vaut mieux que le mensonge ou les non-dits
    Quant à vous, essayez de garder espoir c'est facile à dire je sais. Mais chaque jour qui passe est un jour de gagné et nous sommes toujours vivants; des joies nous attendent encore et aussi des chagrins, mais c'est ce qui fait une vie.
    Vous ai- je dit que nous serions pour la 8ème fois Papy et Mamy? une petite colombe franco-marocaine va naître en septembre; nous l'attendons avec impatience

    Vous dîtes que nous avons peut-être un peu honte de notre maladie. Je ne pense pas que Lila ou Virginie aient honte pas plus que moi mais la seule façon de se protéger, c'est d'occulter la maladie quand on peut, quand elle ne fait pas trop souffrir

    Si un jour, nous allons dans le Doubs, je retiens votre parie: une bonne bouffe dans un resto

    Gros gros bisous à vous, à Cynthia et à Jade

    Mamy

    Des bisous aussi à Lila et Virginie

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