jeudi 25 juin 2015

Vie éphémère

25 juin 2015


Vie éphémère, dont je ne profite pourtant pas dans l'instant présent, sentant lentement monter en moi, sinon l'ennui, tout au moins la monotonie. En ce moment, cet instant, j'aimerai savoir que je vis mes dernières heures, mon dernier jour. Cela en serait alors fini de l'attente, cette inlassable attente qui me traîne comme des chiens tirent un traîneau, m'amenant vers le trou, l'abîme, la fin certaine. Oui, en ce moment de plein chambardement, où tous les jours à venir, ou presque, vont être consacré au déménagement, déménagement dont je n'ai nullement le désir de m'occuper parce que je ne m'en sens pas la force ni l'envie, tout simplement. Oui, si je m'écoutais je resterai ici, sur Rennes, irais voir une assistante sociale à la mairie pour qu'elle m'aide à trouver un foyer qui m’accueille. Ainsi je n'aurai strictement rien à faire, sinon attendre, toujours attendre ma fin, seule chose en laquelle je crois à présent, contrairement à hier où je croyais aux constructions. Un déménagement est une nouvelle construction, toujours, même si l'on déménage à dix mètres. En l'état, aucune construction ne m’intéresse plus, qu'elle me concerne ou non. Oui, en ce moment je suis dans ma maladie, pensant chaque jour à ma nouvelle métastase, à ce cycle infernal qui n'en finit pas, où régulièrement elles se reproduisent, m’abîmant le cerveau, usant mes facultés intellectuelles, m'empêchant de plonger entièrement dans des relations, à commencer par celle qui me lie à ma compagne, compagne dont je m'éloigne, tout du moins dans ma tête, comme s'il n'y avait plus de place dans mon crâne pour de nouvelles choses, de nouveaux moments. Oui, j'ai la tête pleine alors qu'aucun problème lié au quotidien ne vient l'emplir, la remplir d'aléas ou de tracas.

Alors je pense à la mort, non la mienne spécifiquement, mais à la mort en général. C'est un sujet qui me plaît, le seul que je trouve digne d'intérêt et, ce, bien avant l'amour ou je ne sais quoi d'autre. Cet intérêt ne date pas d'aujourd'hui, il remonte à mon adolescence, lorsque pour la première fois je me suis demandé à quoi il servait de vivre puisque l'on devait mourir. Je crois que toute ma vie, tous mes actes, tous mes choix, tournent autour de cette simple question. Cioran y donne des réponses simples, peut-être est-ce pour cela que je l'apprécie autant. Oui, il n'épilogue pas des pages et des pages, comme le ferait un philosophe ou un intellectuel, il va droit au but, prends le chemin le plus court, et après libre à chacun de réfléchir ou non sur les lignes droites qu'il nous suggère.

Il est 20h00 et j'ai face à moi des tables entières où des gens dînent, se restaurent, entretenant par là leur vie. Ce soir, je trouve cela dérisoire. Oui, là encore ils ne font que retarder le moment inéluctable, le moment de leur fin, mais aucun ne pense à cela en plantant sa fourchette dans son assiette. Parfois je me dis que chacun devrait y penser tous les jours, au moins une fois, se pencher sur le problème, le phénomène. Si cela était ainsi, peut-être serions-nous moins cons les uns envers les autres, moins centré sur nous-mêmes, sur notre nombril. Pourtant, moi qui y pense chaque jours depuis presque deux ans, je lorgne sur mon nombril, ne pouvant donc voir le reste, car je ne peux regarder partout à la fois. Oui, ce soir, peut-être effet de la chaleur qui m'assomme, tout me semble comme un fardeau, quelque soit la pensée qui me traverse. Ce n'est pas un bon jour, je le sais, les manifestations, l'humeur de mon esprit me le dit. Ce soir je suis déçu d'avoir peur de mourir. Si cela avait été autrement, je préparerai mon suicide pour l'heure qui suit, histoire d'en finir une bonne fois pour toute. Mais j'ai peur. Alors je dois patienter, encore une fois, attendre que la maladie ou autre chose m'emporte loin de vous tous, de ce monde, de ses futilités, de sa bêtise, de ses contraintes.

Oui, je ne suis pas joyeux ce soir, mais je m'en fou, cela m’ennuie, mais ne me peine pas.

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