dimanche 17 mai 2015

Sortie...

17 mai 2015


Ainsi je suis sorti hier de l'hôpital, en début d'après-midi exactement. Cynthia est venue me chercher, mais nous ne sommes pas rentrés directement à la maison, non, car je voulais profiter de ma liberté enfin retrouvée, totale liberté, loin de ce zoo où se mélangent tout type de pathologie. Oui, je n'en pouvais plus, et hier matin, n'y tenant plus, je signifiais à l'interne qui me suivait qu'avec ou sans son accord je quittais l'hôpital, ne supportant plus de tourner en rond dans ma chambre, les couloirs, les allées ou le reste de l'établissement. Mes analyses de sang étant meilleur, c'est sans difficulté qu'il dit oui à ma demande. Je ne sais combien d'année d'étude il reste à effectuer à cet interne, mais je l'ai vu très consciencieux, soucieux de bien faire son travail, d'établir de bons diagnostics, ne lésinant pas à me faire passer des examens complémentaires pour le conforter dans son idée de me traiter. A présent, je prends donc un médicament supplémentaire, une petite pilule miracle pour le cœur qui sert à régulariser le rythme de ce dernier et, ce, pour six mois. Je ne prends pas cela pour une contrainte, malgré que j'ai déjà tant de cachets à prendre par ailleurs, tant pour mon cancer, ses œdèmes cérébraux, que pour mon humeur.

Cependant, je le ressens et l'éprouve, cette nouvelle épreuve, cette nouvelle expérience, a modifié mon état d'esprit, mais en l'état je ne saurai dire exactement dans quelle mesure. Certes, je pense toujours à mon cancer, il est toujours là, mais plus omniprésent comme il y a encore deux semaines. Pourtant chaque jour j'y pense, matin midi et soir. Mais il ne me bouffe plus la tête, je ne sais comment l'expliquer, le décrire. C'est comme si je l'abordais plus légèrement, avec plus de sérénité. Il m'angoisse moins et, par là-même, c'est la mort, la venue de ma mort, qui m'angoisse moins. Ce que j'ai eu au cœur, cette maladie non mortelle, contrairement au cancer, m'a fait réalisé pleinement qu'autre chose pouvait m'emporter dans l'au-delà, bien avant les dégâts que fera tôt ou tard mon cancer. Oui, je pourrai là traverser la route et me faire renverser. Cela en serait également fini de ma vie. Bref, tout cela pour dire qu'il n'y a pas que le cancer dans la vie, dans ma vie, même si je porte ce poison en moi. Tant de choses peuvent arriver, se produire, des choses néfastes, voire mortelle, bien avant que le cancer m'emporte. Du coup, depuis une semaine, je me sens comme plus léger et ma mésaventure avec mon cœur, paradoxalement, a remonté mon moral, me redonne de la vigueur et, je ne sais pourquoi ni comment, mais je sens que je m'autorise à présent à me projeter dans le futur, le vrai futur, non celui du lendemain ou du court terme, mais bel et  bien celui du moyen terme, voire du long terme. Oui, aujourd'hui cela ne me dérange pas de m'imaginer dans un an, deux ans ou cinq ans, chose impensable il y a encore une semaine. Qu'en sera-t-il demain et dans les jours à venir ? Serais-je toujours dans cet état d'esprit ?

Lorsque nous avons quitté l'hôpital, Cynthia et moi, nous sommes directement allés au café où j'avais fait le malaise générant mon hospitalisation. Oui, je voulais remercier le serveur et la serveuse qui m'avait alors pris en charge, rangeant mes affaires, appelant les pompiers et me soutenant moralement tant j'avais peur de ce qui m'arrivais, n'y comprenant rien, pensant que c'était mon cancer qui me jouait encore des tours. Nous sommes arrivés au café sous les coups de 14h00 et y sommes restés jusqu'à 19h00. Pendant tout ce temps, tandis que Cynthia lisait ponctuellement l'un de ses livres, je regardais sans relâche les gens qui passaient devant nous, des jeunes, des vieux, des touristes, des musiciens. Oui, je goûtais à nouveau, enfin, à ma liberté retrouvée et, comme une bonne chose n'arrive jamais seule, alors que toute la matinée le temps était couvert, le ciel obstrué par des nuages plus ou moins gris, là, toute l'après-midi, le soleil fût présent, éclairant, éblouissant toutes ces heures que j'ai passé à contempler la vie, ses manifestations, à travers la présence, les gestes, les mouvements de tous ces gens que je ne connaissais pas. Puis, vers 19h00 donc, lorsque j'ai été réglé la note de nos consommations au patron du café, j'ai appelé Mike et Charlotte, le serveur et la serveuse, et leur ai remis à chacun 20€ afin qu'il s'offre un restaurant ou je ne sais quoi à ma santé. Oui, les mots, les remerciements, tout cela c'est bien beau, mais je crois plus aux actes qu'à la seule parole et, tout comme lorsque je suis mécontent je le fais savoir par des actes bien souvent, je fais de même lorsque je suis content de quelqu'un, satisfait par cette personne. Enfin, histoire de bien finir cette journée, après le café, Cynthia et moi avons été dîner dans une pizzeria. Inutile de vous dire que nous nous sommes régalés et c'est uniquement sous les coups de 21h00 que nous sommes enfin rentré chez nous, dans notre maison, notre domicile, notre antre, notre lieu secret.

2 commentaires:

  1. Bonsoir Hicham, ça fait du bien de rentrer chez soi après une semaine d'hospitalisation, tu es en bonne humeur et tu fais des projets à long terme, quel bonheur!, je te souhaite un bel avenir avec Cynthia.
    Lila.

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  2. Bonjour Lila et merci de te manifester. Même si nous ne nous connaissons pas du tout (ou alors très très peu), dans mon esprit nous faisons néanmoins partie d'un même groupe, à part des autres, presqu'une sorte de "famille" marquée par une empreinte génétique qui s'appelle le cancer.

    Comme tu le dis, oui ça fait du bien de rentrer chez soi et de redécouvrir des envies, des souhaits, de projeter certaines choses. De ton côté, j'espère que ta cure se passe bien, qu'elle ne te fatigue pas trop et, surtout, n'hésite pas à me mettre au courant de ton état. Même si concrètement je ne peux rien faire pour faciliter ton quotidien, peut-être aurais-je des mots, au moins çà, qui te mettrons un peu de baume au cœur, si tant est que tu en es besoin.

    Je t'embrasse très amicalement et, de tout cœur, suis avec toi.

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