mardi 19 mai 2015

Examens

19 mai 2015


Voila, ça y est, je viens de passer mon IRM cérébrale. Comme d'habitude, le manipulateur n'a voulu me donner aucun résultat et c'est ainsi que je reste avec mes éternelles questions perpétuelles. La taille de mes métastases a-t-elle diminué ? Y en aurait-il une qui, par miracle, serait nécrosé, morte ? Y en a-t-il une qui, par malchance ou destin, se serait créée ? Elle serait alors ma quatrième métastase, la nouvelle petite venue dans le club très fermé qu'est mon cerveau.

Aujourd'hui fût ma journée médicale. Cela a même commencé hier matin, car j'avais une prise de sang à faire pour surveiller mon cœur, l'évolution de ce dernier, sa capacité à récupérer du coup qu'il m'a fait il y a un peu plus d'une semaine maintenant. La prise de sang fut positif, ce qui était mauvais diminuait, c'est donc que tout reprenait son cours, au moins au niveau du cœur et du souffle qui va avec. Ce matin par contre, c'était rendez-vous avec mon médecin généraliste. L'hôpital m'avait laissé un courrier à son attention. Lui et moi avons fait le point. Je lui ai fait part de mon souhait de réduire les doses de cortisones que je prends. Oui, je veux voir ce qu'il en est de là-haut, de mes métastases et de mon œdème, voir si cela se calme, se résorbe, si j'ai une chance que cela n'empire pas. Depuis que j'ai augmenté la dose de cortisone à l'hôpital, je mange de plus en plus, retrouve l'appétit, fait au minimum un repas par jour, sans compter les pains au chocolat que je m'offre le matin. Il paraît que le sucre n'est pas bon pour le cancer, que ces saloperies de cellules cancéreuses sont friandes de sucre, que cela aide à leur reproduction. De la même façon, alors que mon cancer primaire était au poumon, dû aux cigares que je fumais, je ne suis pas bien malin d'avoir recommencé à fumer ce matin alors que je m'étais arrêté durant toute mon hospitalisation. Non, je ne suis pas malin, je ne suis même qu'un pauvre con, n'ayons pas peur des mots là-encore, mais cela m'apaise de fumer, me donne du plaisir d'accompagner mon café d'un cigarillo, et comme j'ai bien peu de véritables plaisirs depuis deux ans, oui, très très peu de réels plaisirs, alors je m’octroie ce plaisir mortel, quitte à perdre des mois de vie, voire des années. Cependant, il se peut très bien que je cesse un beau jour de fumer, comme je l'ai déjà fait dans le passé. Si tel doit être le cas, je ne sais quel sera le facteur déclencheur de cette décision. Mais en l'état je suis trop faible, oui, le terme est bien le bon, trop faible pour résister à la tentation.

Donc je viens de passer mon IRM, suis resté plus de vingt minute dans cette machine à rendre n'importe qui claustrophobe, et j'ai donc pris trois Xanax, mes anxiolytiques, pour ne pas avoir l'impression d'étouffer dans cette machine. S'il n'y avait pas eu cet examen, jamais je n'aurai eu besoin de prendre ces cachets. C'est un dommage collatérale, un de plus dont le cancer est l'origine. Quand à mon scanner, scanner cérébrale et de mes poumons, il est programmé pour vendredi. Une fois ce dernier examen de contrôle effectué, je rencontrerai donc la semaine prochaine mon pneumologue, celui qui chapotte toute la surveillance de ma santé, pour le meilleur et pour le pire. Que m'annoncera-t-il encore ? A vrai dire je n'attends rien de notre entretien, car je sais déjà de quoi il en sera. Soit tout sera en l'état, mes métastases toujours là-haut à m'emmerder, mon œdème ne voulant pas dégonfler, mon cerveau me jouant ponctuellement quelques petits tours dont il a le secret en conséquence, soit il m'annoncera une mauvaise nouvelle. Mais quelque part, comme je sais que tôt ou tard de mauvaises nouvelles arriverons, et si ce n'est pas cette fois, ce sera une fois suivante, il n'y a enfin compte aucune mauvaise nouvelle, juste une précipitation du processus déjà à l’œuvre au pire, une accélération de la propagation de la maladie.

J'ai également vu mon psychiatre aujourd'hui. Quand je vous dis que c'était ma journée médicale, constatez que je ne vous ment pas. Avec lui je m'éclate. Parfois je me demande à quoi je joue en sa compagnie. Effectivement, je ne suis pas à proprement parlé en recherche de je ne sais quelle réponse à mes questions, à mes états d'âme. Certes je les expose, mais ne vais pas plus loin, ne recherche pas l'introspection. Cela, je préfère le faire par écrit, y compris sous vos yeux parfois livide de lire toutes les conneries que je peux sortir. Cependant c'est ainsi, depuis toujours c'est l'écriture qui m'a maintenu debout, hier lorsque j'écrivais en secret, à l'abri des regards, et aujourd'hui à la vue de tous et de toutes, sans aucune pudeur, pudeur qui n'a plus de sens pour moi car quoi que je voudrai cacher, taire, dissimuler, cela n'ôtera ni ma maladie ni tout ce qu'elle engendre, cela ne modifiera plus ma notion du temps, un temps plus qu'éphémère, presque inexistant, même si je passe pourtant des jours et des jours encore à vos côtés, ceux de ma compagne, etc.

Demain sera jour de repos. Rien de médical au programme, à part mes cachets évidement, cachets qui ne risquent pas de me quitter demain. Que ferais-je de ce jour ? Je pense que j'écrirai encore à partir des aphorisme de Cioran. Oui, cet écrivain me stimule. Il dit bien que moi ce que je pense au plus profond de mon être. Pourtant je l'ai connu très tard, j'avais plus de trente ans et, auparavant, jamais je n'avais entendu parler de lui. C'est un écrivain dangereux, car pertinent, sans concession, qui fait valser toutes vos convictions en un revers de verbe. Oui, il n'est peut-être pas à remettre entre toutes les mains, surtout les plus fragiles.

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